"Savoir rénover le pisé" : les professionnels du bâti ancien en terre crue au travail

National audienceL’analyse sociologique des groupes professionnels intermédiaires du secteur de la construction semble se construire en parallèle du fort investissement de la sociologie des professions quant à l’analyse de la pratique des architectes. Comprendre la constitution de ces groupes, leurs transformations et leurs interactions dans l’arène du projet d’architecture semble cependant un projet de recherche particulièrement fécond.La communication proposée tentera d’investir cette approche, en éclairant à la lumière de la sociologie des groupes professionnels les résultats d’un premier terrain de thèse qui m’a menée à la rencontre des « professionnels de la terre crue ». Il s’agira de décrire comment se structure et se pratique un « savoir rénover » le bâti en terre crue sur un territoire localisé (ici le nord de l’Isère), afin de mettre en discussion la structuration de ce groupe, qui se construit à la charnière de plusieurs métiers et professions (architectes, artisans, bureaux d’étude, associations, formateurs).La première partie de la communication reviendra sur la constitution d’un segment professionnel propre aux architectures de terre crue, qui revendique les spécificités de ce matériau (fragilité et accessibilité) pour valoriser des compétences architecturales fortement ancrées dans la pratique constructive, et conduit à l’émergence de carrières professionnelles hybrides, combinant l’artisanat et l’architecture. Il s’agira également de montrer comment ce segment tente de se faire reconnaitre au sein d’une arène professionnelle beaucoup plus large intégrant les acteurs de la réhabilitation du bâti ancien, de l’écoconstruction et de la réhabilitation énergétique.Une analyse plus fine du travail de ces professionnels et des revendications dont il est porteur sera ensuite développée à partir de données récoltées sur des chantiers de réhabilitation, où s’entremêlent les arènes du travail (rencontre entre plusieurs segments professionnels de la réhabilitation), du public (échanges avec des clients participant parfois au chantier), des proches (le réseau professionnel étant restreint à un territoire) et de l’enquête. Deux points particuliers semblant construire la légitimité de ce groupe professionnel seront alors approfondis. Le premier interrogera l’action de « travailler le pisé » et l’attention portée à la mise en œuvre d’un savoir concret, ancré dans une pratique de la matière et une compréhension des détails techniques et des systèmes constructifs. La description de la pratique du diagnostic du bâti permettra ensuite de comprendre comment se construit la légitimité d’un « savoir analyser » négocié comme pratique prudentielle entre architectes, artisans et clients